En coaching, le début du processus consiste à explorer le contexte du client et notamment quel est son mode de pensée issu de sa culture, quelles sont ses valeurs, comment il a évolué et où en est-il de son évolution. L’état des lieux permet ensuite au coach de déterminer sa stratégie et sa tactique d’accompagnement. Je vais aborder ici des concepts qui, entres autres outils dans la boîte à outils du coach, permettent de faire un diagnostic et de caler sa stratégie.
Pour illustrer ces concept, je vais partir d’une citation du livre « une brève histoire de tout » de Ken Wilber. « Ta culture est un aimant pour ton développement personnel. » Dans son livre, il décrit les états de conscience par lesquels l’individu passe lors de son développement. Il décrit l’influence de la culture dans laquelle l’individu est plongé au cours de son développement. Lorsque son état de conscience est au-dessous du niveau de conscience de sa culture, le développement de son mode de pensée est tiré vers le haut. Mais lorsque l’individu dépasse le niveau de conscience de sa culture, cette dernière le retient et le tire vers le bas, à la manière d’un aimant. Une fois sa construction identitaire réalisée, la culture permet donc à l’individu de trouver un équilibre grâce à un centre de gravité constitué par les règles, les normes, l’éthique de sa culture. A la manière de l’effet d’un aimant, il peut retrouver facilement l’équilibre en cas de déstabilisation. Néanmoins, ce peut être un handicap à son évolution. C’est ce que je vous propose de voir aujourd’hui.

Quels sont alors ces modes de pensée par lesquels un enfant passe jusqu’à atteindre celui qui correspond à la culture de son environnement ? Quels sont ceux qui dépassent sa culture ? Quel serait d’après Ken Wilber le stade ultime de conscience et de mode de pensée, s’il existe ? Et puis, est-ce vraiment impossible de passer au-dessus du niveau de conscience de notre culture ? Evidemment que non, nous allons le voir. C’est même comme cela que l’Humanité évolue, grâce à des « précurseurs » ceux qui nous permettent d’évoluer à partir de leur nouveau niveau de conscience et qui nous montrent la voie. Mais alors, eux, comment procèdent-ils pour s’extirper de leur culture et changer de paradigme ?
Ken Wilber décrit les différents modes de pensée par lesquels l’individu passe de sa naissance jusqu’à l’âge adulte. Ken Wilber propose le même parcours que la description de Clare Graves dans son concept d’évolution de Sapiens, la Spirale dynamique.

A la naissance, l’enfant commence par le mode de pensée archaïque basé sur l’instinct de survie. Il passe très vite au second niveau, le mode de pensée tribal. La tribu est constituée par son père, sa mère et frères et soeurs avec une grande place à l’imaginaire, le père Noël, les contes de fées. Puis vient l’émancipation, la prise de conscience d’être un être à part entière, avec l’ego qui prime, le sans foi ni loi et la violence gratuite dans un mode de pensée égocentrique. Ces 3 premiers niveaux sont dans l’ordre le mode de pensée archaïque, le tribal puis l’égocentrique. Ce sont les 3 premiers niveaux d’évolution que Ken Wilber résume par « la construction personnelle. »
Viennent ensuite 3 autres niveaux qui permettent à l’enfant en âge de raisonner d’abord puis l’adulte ensuite de vivre en société, ce que les 3 premiers niveaux ne permettaient pas. Vers l’âge de 7 ans, après le dernier niveau égocentrique de sa construction, l’enfant commence à intégrer les règles de vie en collectivité, l’école, son club sportif. C’est le mode de pensée absolutiste et dogmatique, c’est à dire l’application stricte des règles. Survient alors un nouveau besoin d’émancipation de cette règle trop contraignante. A l’adolescence, l’individu commence à avoir une pensée rationnelle qui permet de contourner voir de remettre en cause les règles. C’est le mode de pensée matérialiste et scientiste. A l’âge adulte, il reste à franchir le cap du mode de pensée relativiste. Ce sont les 3 modes de pensée qui permettent à l’individu de vivre en société. C’est le stade de l’évolution personnelle et conventionnelle.
Et puis Ken Wiber introduit deux autres modes de pensée. Le mode de pensée systémique d’abord puis le mode de pensée holistique ensuite. Le mode de pensée systémique est l’intégration du meilleur des niveaux précédents, tout en rejetant leurs plus mauvais cotés. Le mode de pensée holistique est par définition un mode de pensée qui s’intéresse à la globalité. Ces deux niveaux représentent le stade trans-personnel de l’évolution, l’intégration et la transcendance en même temps. Là où l’individu et son esprit en action intègrent son évolution et se transcendent.

Mais voilà ! Le contexte dans lequel vous êtes plongé et la culture qui teinte votre vision du mode agissent comme un aimant. Votre culture va hisser votre développement, ça c’est positif. Mais vous allez buter contre une limite, la limite fixée par votre culture. En effet, si vous tentez de sortir par le haut du cadre de votre culture, c’est à dire par un mode de pensée qui excède votre culture, cette dernière va vite vous faire rentrer dans le rang. Soit par votre communauté de vie, parents, manager N+1 etc. soit par vous-même par les interdits que vous avez acquis par culture et qui s’imposent à vous. C’est souvent un processus non-conscient parce que vous vous êtes programmé culturellement. Dans une communauté à la culture bien ancrée, le libre penseur est vite « rattrapé par la patrouille » ! Je vais prendre des exemples familiaux.

Un individu, qui a été élevé, par exemple, dans une famille séparée, avec la mère qui fait les 3×8, qui est livré à lui-même donc et encadré par des gangs du quartier, est bloqué dans son développement par le contexte et la culture des gangs. Il baigne dans le sans foi ni loi. Comment voulez-vous qu’il accède au mode de pensée absolutiste et dogmatique du respect des règles ? Son évolution pour vivre en société est compromise. Sa culture acquise agit comme un aimant.
Un individu qui a été élevé dans une famille bloqué sur des dogmes rigoristes soit théistes et religieux, soit non théistes et politiques, est bloqué dans son évolution vers le mode de pensée matérialiste et scientiste qui suit. Sa culture acquise agit comme un aimant.
Un individu qui a été élevé dans une culture d’abondance et de satisfaction des besoins sans compter est bloqué dans son évolution vers le mode de pensée relativiste. La soif de satisfaction de ses besoins individualistes, là, tout de suite et maintenant, est beaucoup trop forte. Le mode de pensée relativiste qui privilégie le collectif et la préservation de la nature pour les générations futures à la satisfaction des besoins individualistes est pour lui impensable. Sa culture acquise agit comme un aimant auquel il lui est difficile de se désolidariser.

Alors … est-il impossible d’évoluer au-delà de la butée constituée par sa culture ? Heureusement que non ! Il y a plusieurs pistes, mais qui tournent toutes autour de la satisfaction des besoins, la spécificité de sapiens. On ne change pas de paradigme, on ne s’extirpe pas de ses dogmes culturels sans entrevoir des besoins vitaux non satisfaits. Comme je le disais dans un récent article à lire ou relire, pour changer et évoluer, il faut un contexte favorable. Le contexte du changement, son terreau même, c’est vivre une crise existentielle. Celle qui nous permet d’entrevoir des besoins vitaux non satisfaits et qu’il est impossible de satisfaire sans changer de mode de pensée, de système de valeurs et de vision du monde.

Le développement personnel réalisé en coaching est une source de changement de paradigme. Les expériences vécues auprès d’autres communautés de vie, ça peut être son entreprise ou une association ou autres, sont autant d’ouvertures vers d’autres modes de pensée qui font voir le monde sous un autre angle. A force de vivre cela, le besoin non satisfait commence à émerger. Le manque nait et se fait cruellement sentir. C’est l’amorce du changement. Vous avez allumé la mèche !
Il existe aussi une autre possibilité d’évolution des modes de pensée. J’en parlais en introduction, les « précurseurs. » Des êtres humains qui, s’étant extirpé de leur culture, ont opéré ce saut de conscience en imaginant un autre système de valeurs, une vision du monde radicalement différente. Bousculant l’ordre établi, ces précurseurs ont bien sûr été emprisonnés, voire crucifiés, pour avoir osé montrer la voie d’une humanité faite de paix et d’amour. D’autres ont été brûlés en place publique avec la langue coupée pour éviter de parler comme Giordano Bruno qui avait osé dire que la terre tournait autour du soleil. Ces précurseurs ont ensuite été la boussole d’autres êtres humains, comme l’empereur Constantin qui a fait de la religion catholique la religion de l’état romain et comme Galilée qui a repris les travaux de Giordano Bruno. Et pour finalement que des millions d’êtres humains suivent cette évolution du mode de pensée pour satisfaire leurs besoins vitaux. Pour ensuite, que survienne une autre crise existentielle qui fera naître d’autres précurseurs et ainsi de suite. C’est comme cela que Sapiens évolue. C’est sa spécificité d’évolution.
C’est la visualisation de besoins vitaux non satisfaits qui vous permettra de vous désolidariser de l’aimant constitué par votre culture et d’évoluer. Mais rassurez-vous, évoluer de votre culture ne revient pas à la renier ! En fait, vous l’intégrez dans un nouveau mode de pensée. C’est une évolution et non une révolution. J’y viens …
Pour les 6 premiers modes de pensée, archaïque, tribal, égocentrique, absolutiste et dogmatique, matérialiste et scientiste puis relativiste, l’évolution se fait à force de s’ouvrir à d’autres contextes et cultures. Par contre, pour accéder aux 2 autres modes de pensée, le mode systémique et le mode holistique qui constituent le stade d’évolution trans-personnel, le mécanisme de l’émergence du besoin est identique mais il faut plus que cela. Il y a un saut de conscience à réaliser, comme le dit Clare Graves. Un véritable saut quantique majeur. Comme le dit Ken Wilber, il convient de faire le saut qui consiste à intégrer tous les modes de pensée précédents sans exception. C’est à dire ne plus les voir comme antagonistes mais complémentaires parce qu’ils ont tous du bon à intégrer et parce que chacun a été le précédent du suivant, sans qui le suivant n’aurait pas pu émerger. Et en même temps que les intégrer, il convient à ce qu’il appelle l’Esprit-en-action de se transcender pour voir le monde dans sa globalité. C’est le mode de pensée holistique suivant les 4 quadrants proposés par Ken Wilber. Un mode de pensée éclairant ! Vraiment ! Ce sera l’objet d’un prochain article. Et d’une conférence que je suis en train de constituer.

Je vous invite à réagir à cet article et sur votre avis sur le lien direct qui existe entre son développement personnel et sa culture. Et si vous voulez évoluer dans ce cadre, le coaching professionnel peut vous y aider. Coach, si vous souhaitez réinterroger les processus de coaching que vous réalisez dans ce cadre, je me suis formé à la supervision. Alors contactez-moi.